Aleksandr Naumovitch Tsfasman (Александр Наумович Цфасман) est né le 14 décembre 1906 dans une famille juive de Zaporijia (Ukraine). Dès l'âge de sept ans, il étudie le violon et le piano et entre à douze ans dans la classe de piano de l'école de musique de Nijni Novgorod en Russie où sa famille a déménagé pour fuir les pogroms pendant la guerre civile. Poursuivant ses études au département de piano du conservatoire de Moscou, Tsfasman se familiarise avec le jazz. Dès 1924, il compose quelques pièces de danse, qui gagnent une large popularité. Fin 1926, il fonde le « AMA-jazz », le premier big band de jazz professionnel à Moscou. Le groupe se produit avec succès dans le jardin de l'Ermitage, sur les scènes des restaurants à la mode et des grands cinémas. En 1927, son orchestre est invité à jouer pour la radio. Ce fut véritablement la première diffusion de jazz en URSS. Malheureusement, le groupe d'Alexandre Tsfasman n'a enregistré aucun disque jusqu'en 1937, malgré ses succès. A partir de 1937, Tfsasman et son orchestre enregistrent une trentaine de titres en deux ans, dont plusieurs fois son "tube" intitulé Sounds of Jazz. Mais malgré la lourde charge de son orchestre, il arrive en même temps à se produire dans des programmes de concerts en tant que pianiste soliste. Des musiciens et compositeurs célèbres comme Chostakovitch admiraient son talent de pianiste. La majorité de ses œuvres étaient d'abord destinées à être interprétées au piano seul, puis arrangées pour un orchestre de variétés. Il s'agit principalement de danses, de chants, de fantaisies et de variations de mélodies populaires. Mais, comme Gershwin, Tsfasman a également composé des œuvres de plus grande envergure, dont la suite de ballet Rot-Front pour orchestre (1931), un concerto pour piano et orchestre de jazz (1941), la Jazz suite donnée pour la première fois en public le 25 novembre 1945 au Conservatoire de Moscou, et un concerto pour piano et orchestre symphonique (1956). Alexandre Tsfasman composait également de la musique pour des représentations théâtrales et des films de cinéma. De 1939 à 1946, l’orchestre de Tsfasman est l’orchestre de jazz résident du All-Union Radio Committee (le VRK) et le groupe enregistre un bon nombre de titres dès le début de cette période. C'est une étape importante car d'une part, le jazz soviétique pouvait désormais être régulièrement entendu à la radio, devenant accessible à tous et dans toutes les régions du pays, et, d'autre part, de nombreux solistes de la Radio d'État ont été appelés à collaborer avec le groupe « Jazz VRK » de Tsfasman. En 1939, est même diffusée la première émission télévisée de jazz soviétique mettant en vedette ce groupe. Durant la Seconde Guerre mondiale, le big band d’Alexandre Tsfasman apporte sa contribution avec les moyens de son art. Ainsi, le premier numéro de guerre du journal Art soviétique rapportait que « les partitions des chansons antifascistes de D. Kabalevsky et A. Tsfasman pour orchestres de jazz seront bientôt publiées ». Au printemps 1942, le Jazz VRK s'installe sur le front avec son effectif complet et un répertoire créé pour l’occasion. Après l’ouverture du deuxième front allié, les compositions d’auteurs anglais et américains trouvèrent aussi leur place dans le répertoire de l’orchestre. En 1946, Alexandre Tsfasman devient directeur musical du théâtre de l’Ermitage, où il réunit un orchestre de jazz symphonique et enregistre des disques. Mais avec le début de la guerre froide, la politique culturelle a changé. À l'été 1946, au cours de la lutte contre l'influence occidentale, Tsfasman fut privé de son orchestre, et un an plus tard, l'orchestre fut dissous. Ses expériences avec la bureaucratie culturelle soviétique le laissèrent amer : en 1957, lorsqu'on lui demanda s'il envisageait de créer un nouvel orchestre, il répondit : « Je suis vieux. J'ai un bon salaire, une datcha à la campagne, une femme et une voiture. L'association des compositeurs m'exige seulement de présenter chaque mois une nouvelle marche, une polka ou une valse […] alors pourquoi devrais-je lutter […] ». À la fin des années 1950 et dans les années 1960, Tsfasman écrivait occasionnellement des morceaux de jazz, apparaissait comme pianiste, critique musical, publiciste et membre de jury, mais se retirait de plus en plus des yeux du public.
Malgré le changement radical du style de la musique de jazz à cette époque, il resta fidèle à son style personnel, et ses œuvres de l'après-guerre ont également joui d'une popularité méritée. Andrey Eshpay, un compositeur, a déclaré que « Tsfasman reste toujours Tsfasman lui-même, un interprète original qui ne ressemble à personne. Sa grande culture personnelle, sa maîtrise brillante [...] et sa passion pour l’art sont autant de témoignages ici ». Dmitri Chostakovitch, qui se produisait lui-même souvent dans diverses salles de concert en tant que pianiste, écrivit à Tsfasman en 1951 : « Je vous adresse une importante demande. J'ai écrit quelque chose comme un concerto de piano pour le film « Unforgettable 1919 ». Il ne vous posera aucune difficulté, mais je ne suis pas capable de le jouer moi-même. Je vous demande instamment de ne pas refuser et de jouer ce truc. Encore une fois, cela ne vous présentera aucune difficulté ». Enfin, le concert anniversaire de Tsfasman en 1956 dans la salle à colonnes de la Maison des Unions, où il démontra une fois de plus ses talents de compositeur, de pianiste et de directeur d’orchestre, constitue une image convaincante du succès et de la reconnaissance du public. En 1966, il devient l'un des fondateurs et membre de la Fédération internationale du jazz à l'UNESCO. Il décède à Moscou le 20 février 1971 d'une crise cardiaque et est enterré au cimetière de Vagankovskoye.
La Jazz suite pour piano et orchestre, composée en 1945, est en quatre mouvements, jouée ici par Loann Fourmental (ci-contre au piano) et l'orchestre symphonique du campus d'Orsay dirigé par Martin Barral:
1 - Снежинки (Flocons de neige - Snowflakes)
2 -
Лирический вальс (Valse lyrique - Lyric waltz)
3 -
Полька (Polka)
4 -
Быстрое движение (Mouvement rapide - Rapid movement)
La durée totale est de 25 minutes environ. L'orchestre comprends 2 flûtes dont un piccolo, 1 hautbois, 2 clarinettes, 1 basson, 3 cors, 2 trompettes, 1 trombone, cordes et percussions (timbales, caisse claire, triangle, cymbales et glockenspiel)
Evidemment, cette "jazz suite" n'est pas plus du jazz que celle de Chostakovitch composée en 1937 dont tout le monde connait la valse. En URSS, on appelait à l'époque "jazz" tout ce qui ressemblait à de la musique de variétés venue de l'ouest.
Vous pouvez télécharger et utiliser gratuitement l'ensemble des partitions qui ont été réalisées par l'orchestre symphonique du campus d'Orsay : conducteur (full score), parties de piano, parties d'orchestre (orchestral parts) sous les conditions suivantes :
- Il est interdit de proposer ces partitions à la vente ou à la location, ou de les mettre en ligne sur un site web ;
- pour toute exécution publique, le programme mis à la disposition du public devra comporter la phrase suivante "Les partitions ont été réalisées par l'Orchestre Symphonique du Campus d'Orsay et sont disponibles sur son site web http://orchestre-orsay.fr/".
En téléchargeant ces parties d'orchestre, vous vous engagez explicitement à respecter ces conditions.
Tsfasman étant décédé en 1971, la "Jazz suite" ne passera dans le domaine public en Union Européenne qu'en 2041, mais elle est dans le domaine public en Russie, où elle a été publiée, depuis 2021 . Si vous voulez la donner en concert public, il vous appartient donc de vous assurer des conditions le permettant.
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